A Éliott et Jordan
Consistant(e) ! Je ne parle pas de la cuisine concoctée par Aurélien Lecuisinier qui, comme son nom ne l'indique que trop clairement exerce le métier de cuistot, mais de l'agenda trail programmé par ce spécialiste des ultra qui ne connaît pas le sens de la mesure. De quoi vous refiler une indigestion kilométrique : en dessous des 100 kilomètres, c'est de la gnognotte. Oui, pour Aurélien, 60 kilomètres, c'est du sprint. Pensez donc : Il vient tout juste d'en finir avec le BUT (112 kilomètres seulement) qu'il se projette déjà sur deux de ses grands objectifs de la saison : le Grand Raid du Finistère qu'il a remporté l'an dernier (166 kilomètres) et l'Algavarnia Ultra Trail (305 kilomètres, 7500 D+). Quoi d'autre au menu ? 216 bornes sur le trail de Chartreuse ou encore en off cet été, une petite sortie de 215 kilomètres sur le GR34. Un grand avaleur d'espaces à l'appétit insatiable, notre Aurélien Lecuisinier. C'est sur le Trail de la Salamandre, à Pouldergat, où il s'était mijoté une petite sortie d'entraînement que je l'ai croisé... En civil ! Alors même qu'il était censé s'offrir les 25 bornes de la Salamandre. Aurélien nous explique pourquoi.
Légende: Spécialiste des longues distances, Aurélien Lecuisinier donne des recettes pour des ultras-trails. Crédit photos: DR
"Sur le Bretagne Ultra Trail, j'ai voulu tester une taille en dessous sur mes chaussures de trail, pour une approche plus dynamique... j'ai terminé avec les pieds bleus, les ongles percés et un résultat largement en deçà de ce que j'espérais." Des chaussures trop petites ! Une erreur de débutant ! Mais on lui pardonnera volontiers parce qu'à 29 ans le néo traileur n'a encore que 5 années d'expérience en matière de course à pied.
En matière de blessure, il semble en revanche avoir déjà une certaine expérience. Je vous renvoie à son compte Insta où il est souvent question de tendinopathie et de pied anesthésié (après 143 kilomètres de course sur l'Ultimate Man quand même...). A la décharge d'Aurélien, on dira qu'on imagine bien qu'à partir de 100 kilomètres et au-delà, la blessure, c'est le lot quotidien des traileurs.
Résultat : L'ultra traileur finistérien a pensé (un instant et le coeur gros) alléger son programme et faire une croix sur le Trail Alsace Grand Est du 17 mai (175 kms). Au final, tout laisse à penser qu'il s'y alignera.
Les erreurs de parcours jalonnent aussi une carrière de néo traileur. (Mais les plus expérimentés d'entre eux ne sont pas non plus à l'abri !)
Dernière en date pour Aurélien : l'erreur collective d'allumage au départ de ce maudit BUT de Clohars ! "Il était 5 heures du matin. Comme dans Koh Lanta, des bénévoles porteurs de flamme balisaient les premiers hectomètres de la course. 300 mètres plus loin, on s'est tous retrouvés coincés devant un grillage." Sans conséquence mais 30 kilomètres plus loin, alors que ses chaussures trop serrées laissaient encore cavaler le Douarneniste, 2ème erreur d'aiguillage.
"Je me suis retrouvé devant deux panneaux directionnels. La balise était masquée. Route ou forêt ? J'ai choisi la route. Je suis arrivé dans une ferme." L'anecdote lui en a rappelé une autre, deux ans plus tôt du côté du trail des Vallées en Ille-et-Vilaine au beau milieu de la nuit. "C'est quand je me suis aperçu qu'il n'y avait plus une seule frontale derrière moi que j'ai réalisé mon erreur."
Mais de son inexpérience et de ses erreurs, Aurélien apprend vite. Et s'il continue de prôner le format ultra, celui qui correspond le mieux à son mental et ses qualités naturelles d'endurance, il n'en est pas moins conscient que son manque de vitesse de base constitue son point faible. "Il faut que je m'impose des séances de fractionné, un plan d'entraînement plus rigoureux et que je respecte aussi les temps de récupération".
Loin d'être évident pour un garçon comme Aurélien qui doit conjuguer ultra-trail et activité professionnelle. Il revenait d'ailleurs des Emirats quand il s'est attaqué au BUT. Si son métier l'amène à beaucoup voyager, pour le trail en revanche, Aurélien ne sort pas des limites du territoire : "Pourquoi aller voir ailleurs ? En France, on a une diversité de terrains extraordinaire. Des régions comme la Corrèze ou les Vosges gagnent vraiment à être pacourues. Même en Ile-de-France (sic), il y a des trails sympas à faire."
La Salamandre fait justement partie de ces trails où la convivialité importe plus que la compétition elle-même. "C'est incroyable comme on est encouragés sur tout le parcours", soulignent Alexandre Auzo et Yannick Lannuzel qui nous ont rejoints. A Pouldergat, les traileurs sont traités aux petits oignons, c'est une évidence. Et à voir les copains franchir la ligne d'arrivée, on sent bien qu'il tarde à Aurélien de rechausser les baskets. Des baskets format XXL cette fois-ci !
Rubrique Carte Blanche à Marc Férec