Entraîneur-joueur, cette double fonction arrive fréquemment, dans les caractéristiques d'un club, président-joueur parfois, arbitre-joueur est nettement plus rare, tant les deux frontières son séparées, très (trop) tôt, dès l'adolescence. Vorace en temps et en énergie personnelle, le rôle d'un arbitre est essentiel et reste entier dans sa gestion. A part, forcément, acteur et pilier indispensable de la bien tenue du match, il ne se combine que rarement. William Gloaguen est une exception à la règle, avec une découverte sur le tard, du costume en noir, à 27 ans, juste avant l'année COVID. Trois ans après, il affiche un enthousiasme, une envie d'apprendre et de grimper, même si une lassitude plus dans un fonctionnement interne commence à poindre. " Ca fait trois ans que j'ai commencé. Je n'ai plus envie d'aller en D3. C'est dur de savoir qu'on a fait un bon match et de rétrograder d'un niveau le week-end suivant, il n'y a parfois pas de logique, et de progression immédiate en cours de saison. Par exemple, mon prochain planning est connu, je vais faire l'ES Landudec Guiler (D2) et le week-end suivant, l'ES Beuzec B en D3", explique William Gloaguen. Avec ce besoin au coup de sifflet final, de s'empresser pour parcourir en voiture le lieu le séparant du match de son équipe première, le CA Forestois en D2, poule B. Joueur dans sa tête, profitant à 30 ans de cette prolongation sur les terrains, il parle avec passion de cette double appartenance, joueur et arbitre.
Légende: Couplant joueur avec arbitre, ou l'inverse, William Gloaguen se multiplie le dimanche pour assouvir ces deux passions, au club de la Forêt-Fouesnant
En D2, le CA Forestois (D2) a doublé les postes. Son recrutement estival a défrayé la chronique pour leur niveau sportif. A l'arbitrage, le club de la Forêt-Fouesnant compte sur deux arbitres, Mathilde Douguet et William Gloaguen. Ce dernier est encore dans l'apprentissage de cette nouvelle fonction d'arbitre, mais il est déterminé à agir sur la durée, et en parle d'une manière passionnée, un vrai signe d'être passé de l'autre côté du miroir. " J'ai un parcours de joueur, aux Paotred Dispount, à l'AS Saint-Yvi ou à la Forêt-Fouesnant. A la base, je voulais aider le club, j'avais été empêché par les blessures. Physiquement, ça devenait plus dur. Le fait d'être joueur m'amène une attitude différente, sans doute. A l'arbitrage, un match se gagne dès le premier coup de sifflet. Il faut montrer aux joueurs une présence, qu'on ne se laissera pas faire. Ca marque les esprits. Je connais les joueurs, il y'a un respect naturel entre nous. J'ai le sentiment de savoir leur parler sur le terrain".
Forcément, en trois ans, la marge de progression est importante. A l'instar d'un joueur qui sait dans sa rencontre qu'il va être bon ou mauvais sur sa première touche de balle, l'arbitre est un élément fixe de ces 90 minutes, un baromètre qui doit être stable, pour ne pas que le vent varie. " Comme sur le terrain, j'ai ce besoin d'être acteur. Il me faut mon coup de sifflet. Je veux qu'il y'ait de l'ambiance, qu'il y'ait des supporters pour donner une vie au match. Plus la rencontre est attendue, plus je ressens une forme de motivation. Cette attitude que j'ai joueur, je l'ai dans l'arbitrage".
Pris dans une mécanique, qui peut apparaître enrouillée dans ses rouages, William Gloaguen avoue franchement pouvoir ressentir une lassitude si sa situation n'évolue pas. " Il faudrait qu'on soit plus accompagner. Nous avons des formations à Ploufragan ou Châteaulin, mais l'accompagnement, le dimanche, est très important pour un arbitre. Il est seul, et la meilleure chose pour progresser est d'échanger avec quelqu'un qui connaît notre rôle. Je suis demandeur. Le plus dur finalement, est de savoir superviser en début de saison, et devoir attendre l'issue finale en mai et notre niveau d'arbitrage sur la saison prochaine. Dans le Nord-Finistère, il y'a plus de superviseurs que dans le Sud-Finistère. J'espère que ça va évoluer, je ne veux pas rester stagner. Même faire la touche en ligue, je serai super content car ça signifiera être en équipe avec deux autres arbitres".
Rangeant son sifflet bien dans son sac, pour sortir au plus vite sa panoplie de joueur, William Gloaguen arrive très souvent à contre-temps dans les vestiaires de son équipe, une fois que le match a commencé. Il s'asseoit et se tient prêt à donner un coup de main, à son poste de meneur de jeu. " A part gardien, j'ai joué à tous les postes. J'ai été freiné par des blessures au genou, alors j'en profite à fond. Tant que je peux, je continuerai. Après, il faudra faire un choix entre arbitre et joueur. J'aimerai aider à ce que la Forêt-Fouesnant retrouve un niveau ligue. Joueur, on le devient naturellement, arbitre, il faut que ça vienne de soi-même, autrement, ça ne sera que sur du court-terme. Un arbitre doit impérativement arriver à communiquer. S'il reste dans sa bulle, il sera en souffrance. Mais ça apporte beaucoup de choses personnellement. Je l'encourage mais il faut ressentir cette envie"
Photo illustration équipe: Pascal Priol